Intervention de Gille Deterville dans le cadre de la réunion conjointe entre le Conseil régional de Normandie et le CESER de Normandie sur la modification du SRADDET dans le cadre des évolutions législatives prévues par la loi Climat et résilience votée en 2021.

Messieurs les Présidents,

Tout d’abord, je souhaite saluer Jean-Luc Léger et à travers lui l’excellence du travail fourni par le CESER. Notre Région serait bien inspirée de suivre davantage ces recommandations.

Au nom de notre groupe, je ferai une intervention nécessairement courte qui sera largement complété pat les questions ou remarques que feront mes collègues dans la suite de nos débats.

Le SRADDET inscrit la loi NOTRe voulue par la gauche est un bon outil de mise en cohérence et en perspective des diverses politiques régionales qui se traduisaient par 6 schémas. Voici en quelques mots notre état d’esprit au moment où l’on commence véritablement l’examen de cette modification. En quoi cette modification apportera suffisamment d’éléments positifs nous permettant de faire évoluer notre vote final en avril. Je rappelle que notre groupe n’a pas, en décembre 2019, approuvé le SRADDET.

Modifier et non réviser le SRADDET a donc été votre décision, c’est regrettable eu égard aux différents changements qu’a connu notre pays depuis 2019.

Nous savons, par exemple, que la population globale de la région sera en constante diminution (autour de 8 000 habitants par an) selon les prévisions de l’INSEE et les disparités de développement ne tendront pas à disparaître.

Vous aurez beau minimiser ce fait, une région qui perd des habitants n’est pas une région en bonne santé. Notre région est marquée en effet par de fortes disparités entre certains territoires à la démographie dynamique et d’autres qui se vident. Les pôles urbains peuplés sont mieux équipés en matière de services publics et de transports en commun, alors que les zones rurales souffrent d’une désertification médicale et administrative, entraînant une forte dépendance à la voiture individuelle.

Les crises énergétiques, alimentaires, sanitaires, sociales, ont démontré à quel point les zones rurales sont plus fragiles que le reste du territoire. L’augmentation du coût des énergies a précarisé davantage de nombreux foyers qui rencontrent des problématiques de non-recours au soin, et connaissent un isolement plus marqué.

Ce sentiment justifié d’abandon par les pouvoirs publics est par ailleurs le terreau d’un vote extrémiste dangereux à terme pour notre pays. Le lien ruralité-urbanité est à reconstruire parce qu’il est un atout pour la Normandie qui dispose d’un maillage important de villes moyennes.

Le SRADDET doit donc être modifié pour se conformer à diverses évolutions législatives dont la loi Climat et Résilience.

Le SRADDET, en s’imposant aux documents d’urbanisme locaux, constitue un bon outil de mise en cohérence de ces documents en fixant des objectifs ambitieux en matière d’équilibre des territoires, de transition écologique et sociale. Mettre en cohérence les politiques d’aménagement, réduire les inégalités territoriales et favoriser une croissance durable tels sont bien les 3 objectifs essentiels du SRADDET.

Nous devons inspirer de nouvelles logiques de développement en allant résolument vers la ZAN qui doit être au coeur de nos préoccupations.

Pour autant, parce qu’il n’y a pas constitutionnellement de tutelle d’une collectivité sur les autres, nous ne pouvons pas contraindre mais convaincre même s’il existe l’impératif pour les PLU et PLUI de prendre en compte les objectifs du SRADDET.

Cette révision ne doit pas se limiter à un simple dépoussiérage du schéma actuel, en partie inadapté aux enjeux que rencontre les territoires normands. Pourtant vous avez choisi de ne traiter que 3 thématiques (foncier logistique et déchets) parmi les 11 thématiques obligatoires qui doivent figurer dans un SRADDET.

Permettez-nous de regretter que le volet Habitat ou Intermodalité et Développement des transports ne soient pas repris alors qu’à l’évidence les attentes et les besoins sont importants dans ces domaines. Comment par exemple ne pas prendre en compte la croissance du télé-travail un phénomène devenu structurel.

La décarbonation la plus accélérée possible de nos activités doit être la priorité absolue. Tous les projets ne permettant pas de maintenir une bonne trajectoire de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre doivent être adaptés afin de répondre à cette urgence.

Le SRADDET doit être un guide à l’usage des collectivités locales et des porteurs de projet. Les projets présentés ou les initiatives envisagées seront ils en accord avec la trajectoire de décarbonation de notre territoire ? Ce schéma doit proposer des échelles de réflexions sur les questions foncières qui soient en adéquation avec les réalités de chaque territoire. À ce titre, l’échelle des SCoT est pertinente pour territorialiser l’approche du ZAN et permettre une vision tant qualitative que quantitative des besoins est à retenir.

Le SRADDET devra prescrire, avant tout projet de création ou d’extension, un préalable de réhabilitation et de valorisation des friches.

Les politiques court-termistes font perdre un temps précieux dans la préparation aux changements qui s’amorcent. Le coût de la non-adaptation à ces changements sera plus lourd que celui auquel on nous invite. Chaque projet devra intégrer les perspectives climatiques, la multiplication des pics de chaleur, la raréfaction de la ressource en eau et le risque inondation. Les conclusions des avis du GIEC normand devraient être rappelées en préambule de chaque grande orientation du SRADDET.

Le SRADDET doit en effet être construit autour d’une vision à horizon 2050 et plutôt que 2030, pour accompagner nos territoires dans des aménagements réellement durables. Pour mobiliser et impliquer les territoires autour d’objectifs de transition ambitieux, il faut chercher à obtenir l’appropriation des populations à ce changement de paradigme que doit impulser un SRADDET.

Depuis l’approbation du SRADDET en décembre 2019 il y a 3 ans, les terres agricoles continuent d’être grignotées, la région finance toujours des routes et soutient l’implantation de zones d’activités.

Nous pouvons nous réjouir que la loi Climat et résilience vous oblige à intégrer des éléments réglementaires pour rendre le SRADDET 2020 plus ambitieux. Nous pourrons espérer que le dérèglement climatique, la remise en question de nos modes de vies et de nos capacités de résilience, soient enfin des enjeux définitivement reconnus de notre collectivité. C’est, au final, un changement de société qui doit nous être proposé.